formation
16 octobre 2025

Développer, c’est comme tracer un mandala

Dans un quotidien où le code évolue plus vite que nos to-do, prendre du recul devient un vrai super-pouvoir. Nicolas, développeur et formateur Tests avec C++ pour Human Coders, partage ici des retours de terrain pour aller à l’essentiel : ce qui marche, ce qui bloque, et comment l’implémenter proprement.

Chaque ligne est essentielle… mais éphémère.

Il m’est arrivé, comme à nous tous, de passer des jours à développer une fonctionnalité. J’y ai mis du cœur, de la rigueur, des tests, des revues de code… Tout était prêt. Tout était beau. Et pourtant, cette feature n’a jamais vu le jour chez le client.

Il avait changé d’avis.
C’était trop tard, ou plus le bon moment. Ou peut-être que ce besoin n’avait jamais réellement existé.
Mais cette fonctionnalité, je l’avais pensée, portée, façonnée.
C’est à ce moment-là qu’une étrange idée m’est venue : et si, au fond, le développement logiciel ressemblait à un mandala ?

Le mandala : créer pour mieux laisser partir

Dans certaines traditions bouddhistes, les moines passent des jours à tracer des mandalas de sable, millimètre par millimètre. Des œuvres sublimes, d’une précision incroyable. Puis, une fois l’œuvre terminée, ils l’effacent. Délibérément. Le but n’est pas le résultat. Le but est le processus.
C’est là qu’on touche quelque chose de profondément humain.

Car coder, c’est aussi construire quelque chose de beau et complexe, tout en sachant que cela pourra être modifié, ignoré, ou détruit. Pas parce que c’était mauvais. Mais parce que le monde change, les priorités évoluent, et que notre travail est, par essence, impermanent.

Mais alors… à quoi bon ?

Quand on vit ce genre de situation, la frustration est grande : « À quoi bon s’impliquer ? Pourquoi fournir une qualité à toute épreuve si tout peut disparaître demain ? »
Mais ce serait passer à côté de l’essentiel.
Car le code n’est pas que ce qui tourne en production.
C’est aussi ce que l’on apprend en l’écrivant.
C’est la discussion que cette ligne a provoquée en code review.
C’est la conception qui a nourri la vision du produit.
C’est l’échange d’idées en équipe.
Et c’est l’intention qu’on y a mise.

Développer, c’est faire avec l’éphémère

On ne le dit pas assez, mais le métier de développeur n’est pas seulement technique.
C’est aussi un métier d’acceptation.
Accepter qu’une architecture élégante sera parfois remplacée par un hack pragmatique.
Accepter qu’une fonctionnalité, aussi bien pensée soit-elle, ne corresponde plus aux attentes trois sprints plus tard.
Accepter que son code sera relu, corrigé, généré et parfois réécrit… et que c’est normal.
Le code, c’est un flux continu. Une construction en mouvement. Un produit vivant. Et comme toute chose vivante, il change. Il mue. Il disparaît.

Cela veut-il dire qu’il ne faut pas s’y investir ?

Absolument pas.
Bien au contraire.

Tracer un mandala n’est pas un acte futile. Il demande concentration, engagement, sincérité.
C’est justement parce qu’il est éphémère qu’il mérite toute notre attention.
Il en va de même pour le code.
Il faut écrire chaque ligne avec le soin de celui qui sait qu’elle ne sera peut-être pas éternelle.

Pas pour faire joli, ni pour flatter son ego, mais parce que la valeur d’un développeur ne réside pas dans les lignes qu’il écrit, mais dans sa compréhension du besoin, ses échanges avec l’équipe, sa capacité à co-construire le produit.

Travailler dans l’impermanence, mais pas dans le vide

Ce que j’aime, dans mon équipe, c’est ce sentiment de construire ensemble. On ne trace pas chacun notre petit coin de mandala, dans notre coin. On discute. On confronte. On ajuste.
Et même si certaines parties sont redessinées le lendemain, tout le monde y gagne. Parce que l’apprentissage est partagé. Parce que le produit mûrit avec nous.

Participer à toute la chaîne de valeur – de la conception à la release – c’est une manière de donner du sens à ce que l’on trace. Même si ça doit changer demain. Même si certaines parties seront balayées.

Développer, c’est comme tracer un mandala.

Et peut-être que c’est ça, au fond, être un bon développeur :
Savoir créer quelque chose de beau et utile…
… tout en étant prêt à le laisser partir.

Nicolas Meo – Formateur Tests avec C++

Nicolas développe en C++ depuis 2017 et accompagne les équipes à concevoir code et tests comme deux faces d’une même pièce. Dans sa formation, on maîtrise GTest et GMock, on refactore sans stress, et on transforme les tests en véritables alliés du produit.

Nicolas donne la formation Tests avec C++. Vous pourrez trouver plus d’informations sur lui sur son profil.