J’ai rencontré Anthony lors de l’inauguration du magasin Cultura Porte de La Villette (à Paris), où il venait d’être fraichement embauché pour faire partie de l’équipe d’animation en tant que professeur de guitare.
Profitant de la fin de sa journée pour venir faire une partie de babyfoot connecté en démonstration ce jour-là, avec moi et la coach présente pour l’occasion, nous avons rapidement sympathisé et commencé à discuter de lui, de ses aspirations et de ses projets.
Au fur et à mesure de cette discussion j’ai découvert un jeune homme brillant, qui travaille dur pour lancer son projet de studios de répétition pour les musiciens ouverts 7/7 et 24h/24, un profil atypique qui déjà, avait dans l’idée de se former au code.
Voici son portrait.
Autodidacte par essence
Anthony a 24 ans et c’est ce qu’on peut appeler un autodidacte. Après avoir arrêté l’école à 16 ans, sans même un brevet des collèges en poche, il décide tout simplement de continuer ce qu’il aime faire, jouer de la guitare, et s’inscrit alors en école de musique.
Mieux encore, ayant des difficultés à trouver des endroits où répéter avec les groupes avec qui il travaille, il décide de créer une association avec des amis, le Labo des Sons, et loue un studio de répétition dont il gère la grande majorité des aspects.
Équipant le studio de matériel, accueillant les résidents comme les one shots, Anthony touche à tout en continuant son travail et ses passions, c’est-à-dire lire énormément et faire de la musique. Mais cela devient vite difficile à gérer.
Il décide alors de lancer son projet « Studiomatic », qui vise à mettre à disposition des studios de répétition ouverts 24h/24, 7j/7 et entièrement automatisés. Un projet où les musiciens réservent et payent sur internet puis accèdent aux studios via l’application smartphone en guise de clef.
Malgré les connaissances basiques d’Anthony en terme de dev, issues de ses différentes expérimentations et de connaissances transmises par un proche étant plus jeune, difficile pour lui de développer seul son projet techniquement.
Après quelques recherches infructueuses d’un CTO, Anthony décide de prendre le taureau par les cornes : concilier son travail et le développement de son projet avec une formation en code qui ne nécessite pas de diplôme.
The Hacking Project, une formation intense
Au détour d’une conversation avec un ami je découvre The Hacking Project, une formation au code intense de 2 mois et demi, dont je parle rapidement à Anthony. Il décide alors de se renseigner puis de se rendre au meetup de présentation pour poser des questions aux fondateurs, Felix et Charles.
La formation est annoncée difficile, avec un taux d’abandon proche des 50%, à plein temps, exigeante et très axée Ruby. Mais Anthony décide tout de même de se lancer, lassé des formations sur le web, type UDEMY et autres John Le Codeur, surtout lassé de recopier du code sans comprendre et sans support en cas de problème.
Véritablement décidé par la rencontre avec les fondateurs, il accepte de payer une caution de 200 euros en cas d’abandon, valide la track Ruby sur Codeacademy, condition sine qua none pour s’inscrire, et rejoint le Slack de la formation où il est affecté à un groupe hétérogène en terme de profils mais proche en terme de localisation.
Et on peut dire que les profils sont variés : community manager, journaliste & philatéliste, ingénieur en mécanique des fluides… Et tou·te·s viennent avec des buts variés : coder leurs propres outils pour se faciliter la vie de CM, proposer des sites de timbres, devenir développeur·se, changer de voie professionnelle…
Du code, du code et encore du code
Tout d’abord le déroulement de la journée. Il est simple : tous les matins vers 9h le programme de la journée est publié. La matinée sert à apprendre avec les ressources fournies puis les élèves les appliquent toute l’après midi dans le cadre de projets.
La 1ere semaine est dédiée au HTML / CSS / JavaScript / jQuery. Même s’il s’agit d’une semaine d’intro aux langages pour les élèves qui apprennent à utiliser le terminal, installer Ruby, les packages, Git/Github, l’éditeur de code, etc.… du point de vue projet, cette 1ere semaine est déjà challengeante : il faut refaire la home page Google.
Projet difficile pour les débutants et validant pour la suite, il est surtout sans pitié : tout·e élève qui ne push pas les projets sur Github dans les délais est considéré·e comme « abandonnaire », et perd donc ses 200 euros. Il·elle peut néanmoins continuer la formation.
Les 2 semaines suivantes sont consacrées à Ruby. Globalement axées sur les APIs, elles servent d’apprentissage à la programmation orientée objet, à découvrir des gems, à comprendre les instructions. Bref 2 semaines pour apprendre à apprendre, avec des projets tels que scrapper les annuaires des mairies ou encore créer un bot Twitter.
Ce sont 3 semaines de plus qui s’ajoutent à cette partie Ruby avec la découverte de rails. Les élèves découvrent le framework, les commandes bash (terminal) propres à Rails, comment fonctionnent l’architecture MVC (models, views, controllers) et les langages associés, ou encore découvrent les gems fondamentales de Rails comme Devise.
Point d’orgue de ces semaines Ruby : 1 semaine sur le livre de Mickael HARTL permettant de découvrir les requêtes HTTP (GET/POST/PATCH/PUT/DELETE), l’écriture des données sur la BDD ou encore le CRUD (create, read, update & destroy).
À ce niveau-là, avec 6 semaines de code « dans les pattes », selon Anthony soit tu es épuisé·e, soit tu as abandonné, soit tu es content·e que ça se finisse. Et ce n’est pourtant pas fini. Il faut enchainer encore avec 2 ou 3 semaines de frontend où il doit revoir HTML, CSS, JS, jQuery.
Différents challenges viennent valider cette dernière étape : refaire la page du New York Times, refaire des landing pages actuelles et stylées, s’initier au framework de style Bootstrap, apprendre l’AJAX et enfin découvrir Node.js.
La formation est validée par un projet final, soumis aux votes de la communauté, et porté par une équipe déjà définie. C’est 2 semaines plus tard qu’il faut pitcher le projet pendant 5 à 10 min lors des démos days filmés, consécration de la formation, le tout accompagné d’une démo live.
À cette occasion les élèves changent de grade. Ils passent de moussaillon à corsaire et font désormais parti des alumnis. Ils·elles restent alors sur Slack, ont accès aux ressources, aident les nouveaux arrivant·e·s, animent des ateliers en live et, quand ils·elles sont sollicité·e·s, mentorent les groupes pour les projets finaux.
Let’s talk about future
Fort de cette entrainement intensif, et avec l’aide de son équipe de 4 personnes travaillant sur son projet, Anthony a présenté la 1ère version de son site lors des démos days. Très bien accueilli malgré quelques petits bugs, il a continué alors à travailler sur celui-ci avec son groupe réduit à 3 pendant encore 1 mois après la fin de la formation.
Très content de cette formation ultra exigeante, Anthony pense que rien ne lui paraît impossible en terme de code désormais. Il pense sincèrement être armé pour attaquer différents aspects techniques de son projet et sait désormais casser les barrières techniques même si cela reste chronophage.
Il est d’ailleurs en plein développement de son projet avec une première version de son application mobile qui devrait sortir en février 2018 et un premier studio entièrement automatisé qui devrait ouvrir à Paris pour fin 2018.
Il est resté en contact avec la communauté de THP, dont il voit de nombreux·ses membres régulièrement, organise des ateliers sur divers sujets (blockchain, RubyMotion, bases de développement front), témoigne pour les fondateurs aux meetups et bénéficie grâce à eux depuis quelques semaines d’une très jolie visibilité média sur son projet. Un garçon à suivre donc.
NB : Si vous avez un parcours étonnant, que vous avez suivi une formation différente pour devenir développeur·se, que vous êtes autodidacte, bref que vous êtes atypique, n’hésitez pas à m’écrire à cette adresse : [email protected]